Joinville Pomare s’est fait introniser roi Pomare XI

Joinville Pomare s’est fait introniser roi Pomare XI

Vêtu de noir qui est la couleur royale, Joinville Pomare s’est fait introniser roi Pomare XI et Sa Majesté s’appellera désormais, Hinoiariki Pomare a tu ou Pomare XI. La cérémonie d’intronisation s’est déroulée dans les jardins de l’Hôtel Royal Tahitien. Quant à la princesse Yvannah Pomare, cette cérémonie « n’est qu’une mascarade ».

En ce jeudi 28 mai 2009 dans l’or du couchant, Joinville Pomare s’est fait reconnaître et introniser roi Pomare XI.
Ponctuée de symboles, la cérémonie s’est déroulée devant une cinquantaine de membres de la famille de Joinville et descendants de chefferies d’antan. On notait néanmoins, l’absence de son frère Wilfred Pomare et bien évidement du Prince Léopold et de la Princesse Pomare qui refusent catégoriquement de reconnaître « cette comédie ».

Pas couper la tête

« Le Pacifique entier est commandé par des rois. La république n’existe pas dans le Pacifique. C’est une invention de ceux qui sont venus de l’Occident. Les Polynésiens n’ont pas coupé la tête de leurs rois à la différence de la France », explique Joinville Pomare qui s’est fait roi « parce que mon peuple est à la dérive. Il est important qu’aujourd’hui, on s’occupe de lui ».

La polémique familiale

« Ce n’est qu’une petite affaire de famille », a déclaré Joinville Pomare à propos de la polémique avec son frère Wilfred Pomare qui, lui aussi, crie à la mascarade tout comme la famille royale, en particulier, la Princesse Yvannah Pomare, descendante de la fille de Ari’ipaea Pomare, Denise Pomare. Ils rappellent en effet que Joinville Pomare est né Johnston, puis il a été reconnu par Céran Jérusalémy et enfin adopté par Pomare.
Dans une récente interview, la princesse Pomare déclarait « un certain individu (ndlr Joinville Pomare) âgé d’une cinquantaine d’années, dit s’être battu pendant quarante ou cinquante ans pour défendre les intérêts des Pomare, alors qu’il y a cinquante ans, il avait sept ans. C’est ridicule ! ».
« Monsieur Léopold Pomare qui est mon oncle est parti en France à l’âge de 17 ans et il n’est plus jamais revenu. Le seul représentatif de la famille royale dans ce pays qui a lutté depuis cinquante ans, c’est celui que vous avez devant vous », réplique Joinville Pomare.
Quoi qu’il en soit, « aucun roi du Pacifique ne voudra participer à cette mascarade », rétorque la princesse qui ajoute : « Je ne vois pas comment des rois ou notables pourraient cautionner un roi qui n’est issu d’aucune descendance royale. Personne ne peut prétendre devenir roi quand il y a encore un prince Pomare, Léopold », répond la Princesse Yvannah Pomare.

Un peu d’histoire

« Dans un monde où tout va si vite, où les repères sont perdus, on peut s’interroger sur l’intérêt d’une telle démarche », a expliqué le porte-parole de Sa Majesté, R. Doom au public. Et de développer : « Pour mieux le comprendre, permettez-moi de faire un petit rappel de notre histoire. Avant l’arrivée des Européens, toute la Polynésie était dirigée par des rois. Ce personnage puissant et respecté avait pour mission d’assurer la paix, l’ordre et la prospérité. Le roi possédait la terre qu’il confiait à ses sujets. Pour assurer son autorité, il s’appuyait sur la classe des Hui Arii.
Le roi pouvait aussi compter sur ses guerriers qui étaient sous la responsabilité des chefs de guerre. Lorsque son autorité était remise en cause, si son territoire devenait insuffisant pour nourrir ses sujets ou s’il avait des projets expansionnistes, le roi partait en guerre. Dans d’autres cas, des alliances suffisaient. Cet état de fait prévalait lorsque les premiers navigateurs ont découvert nos îles ».

Les deux traités

Le porte-parole du roi informe que « les Occidentaux ont d’ailleurs été très impressionnés par les sociétés sophistiquées qu’ils ont pu y observer, à tel point que la France et l’Angleterre ont cherché à s’installer chez nous.
Et c’est ainsi que la France a signé avec la reine Pomare IV en 1842, puis le roi Pomare V en 1880 deux traités : le premier imposant le Protectorat, le deuxième étant le traité d’annexion.
Ces conventions entre deux états comportent un certain nombre d’engagements. Pire, depuis l’époque de la colonisation jusqu’à nos jours, notre culture, nos coutumes et nos croyances sont tombées dans l’oubli grâce à la participation active d’une administration coloniale ayant pour objectif de diriger, de contrôler et de faire fonctionner notre territoire selon ses valeurs et selon ses intérêts.
Sans oublier la participation tout aussi active et complice des missionnaires et des prêtres ».

Diviser pour mieux…

« La royauté polynésienne qui était un fait établi a été depuis l’objet de continuelles médisances, d’injures et de féroces calomnies basées sur les normes importées des puissances coloniales des antipodes et ce, jusque dans les livres d’histoire.
Ceci pour discréditer l’ancienne Polynésie et faire croire aux générations suivantes que la royauté faisait partie d’un passé définitivement révolu et que la royauté n’aurait plus de sens pour les Polynésiens d’aujourd’hui.
C’est toujours et encore l’éternelle pratique qui consiste à diviser pour mieux régner. On voit le triste résultat de cette politique centenaire tous les jours : la société polynésienne est devenue schizophrène. Notre jeunesse déboussolée a perdu tous ses repères et essaie de trouver sa dignité… dans la consommation ».

Joinville attendait depuis 129 ans

« Pourtant, le traité d’annexion reconnaît la royauté, car il a été adopté par l’Assemblée nationale puis par le Sénat et ratifié par le président de la République Jules Grevy. Pour nous, le roi reste le garant moral de l’unité du pays, il est le gardien des traditions polynésiennes tout comme il doit être le garant des intérêts de ses sujets.
Par conséquent, il faut dès aujourd’hui engager des pourparlers et réclamer à la France le respect de ses formels engagements.
Le roi est la seule personnalité à pouvoir le faire. Et pour cela, il doit retrouver la place vacante depuis 129 ans maintenant. D’ailleurs, un peu plus loin dans le Pacifique, chez nos cousins polynésiens de Wallis et Futuna, la royauté n’a jamais cessé d’exister ».

Des rois que l’on paie

« Les trois rois, dont un siège a Wallis et deux à Futuna, y sont non seulement des personnages respectés, mais sont en plus rémunérés par l’État qui les consulte pour tous les problèmes locaux.
Nos autres cousins de Nouvelle-Zélande, de Tonga, de Samoa ou de Rarotonga ont eux aussi conservé leurs structures coutumières polynésiennes.
C’est donc exactement ce que nous voulons pour la Polynésie française.
D’ailleurs, la reine Pomare IV avait elle-même organisé la procédure de désignation de son successeur par le biais d’ordonnances royales.
Selon ses prescriptions et selon une généalogie révélant une lignée ininterrompue, c’est donc sans aucune équivoque que Teriihinoiatua Joinville Pomare a Tu s’est révélé être le digne successeur de la si populaire Pomare Vahine.
D’autant plus que les représentants des chefferies traditionnelles de plusieurs îles dépendant du royaume de Tahiti viennent de confirmer ce choix.
Nous sommes heureux de vous présenter notre roi qui s’appellera désormais Hinoiariki Pomare a tu ou Pomare XI ».

Un roi peut en cacher un autre

Récemment à Bora Bora, un résident de Maupiti, Tetua Ura s’est fait introniser roi de son île dans un hôtel haut de gamme, lors d’une soirée fastueuse. Il laisse entendre qu’il pourrait étendre son royaume sur les îles de la Société.
Quant à Sa Majesté le roi Pomare XI, il a officiellement annoncé que le 9 septembre 2009, « les royautés du Pacifique et de la Polynésie seront présents à Arue pour une cérémonie d’intronisation de cette royauté ».

La lutte continue

Joinville Pomare (ô pardon Sa Majesté !) n’abandonne pas pour autant sa lutte pour le foncier. « Au contraire. Plus que jamais ! C’est l’une des raisons pour lesquelles cette royauté s’est mise en place » déclare le roi.

À propos de l'auteur :

Hina
Hina Teariki

Hina Teariki est une journaliste polynésienne de 38 ans, née et élevée à Papeete. Diplômée en journalisme de l'Université de la Polynésie française, elle a commencé sa carrière en 2008 comme pigiste pour divers journaux locaux avant de rejoindre Tahiti Presse en 2010. Passionnée par la culture et l'environnement polynésiens, Hina s'est spécialisée dans les reportages sur le développement durable, le changement climatique et la préservation des traditions locales. Elle est connue pour son style d'écriture engagé et ses enquêtes approfondies sur les enjeux sociaux et écologiques du fenua.

Hina Teariki est une journaliste polynésienne de 38 ans, née et élevée à Papeete. Diplômée en journalisme de l'Université de la Polynésie française, elle a commencé sa carrière en 2008 comme pigiste pour divers journaux locaux avant de rejoindre Tahiti Presse en 2010. Passionnée par la culture et l'environnement polynésiens, Hina s'est spécialisée dans les reportages sur le développement durable, le changement climatique et la préservation des traditions locales. Elle est connue pour son style d'écriture engagé et ses enquêtes approfondies sur les enjeux sociaux et écologiques du fenua.

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